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  article 4- LE TSUNAMI ET LE DEFERLEMENT DES IMAGES.
 
 
 
 
 
 

            

article 4- LE TSUNAMI ET LE DEFERLEMENT DES IMAGES.
   

Avant le 26 décembre 2004, peu de monde à l’exception des scientifiques, climatologues, météréologues, géographes, de la population japonaise ou de distingués nippophones connaissait le mot tsunami.
Le vocable japonais tsunami signifie la «vague dans le port » 
.En 1946, un raz de marée provoqué par un séisme aux iles Aléoutiennes ravagea les îles Hawaii.
Les habitants japonais de ces iles parlèrent alors de tsunami.
Aujourd’hui, ce mot est connu du monde entier pour être apparenté à la plus grande catastrophe du siècle, celle qui en cette période des fêtes ravagea plus de onze pays et qui a provoqué la mort de plus de 165 000 personnes et des milliers de disparus.
La catastrophe naturelle la plus médiatisée en regard des précédentes catastrophes naturelles.
Le monde a été envahi par un flot ininterrompu d’images des télévisions qui les repassaient en boucle jusqu’à la nausée.
Images floues, mal cadrées, des «captures video »  faites même par des touristes présents sur place.
Le touriste est devenu le témoin privilégié, un journaliste de l’instant qui a vécu en direct l’événement.
Ce qui fait débat aujourd’hui est le fait justement de la présence des touristes occidentaux et de leurs images.
En aurait on parlé autant s’il n’y avait pas eu la présence de tous ces Occidentaux.. Nul ne le sait.
Il y a deux ans de cela, lorsque la guerre en Irak venait d’être déclenchée, nous écrivions dans Belles Images n° 77 d’avril 2003 : «  Un conflit est médiatisé s’il intéresse la presse occidentale. Les opinions publiques occidentales se mobilisent contre cette guerre car elle implique des puissances occidentales.
Que la Russie écrase la Tchéchénie, que l’Inde ait des escarmouches avec le Pakistan à propos du Cachemire ou que Saddam ait réprimé ses populations kurdes ou chiites n’ont jamais vraiment mobilisé les foules »

Durant les années 1970, le sociologue canadien, Marshall Mc Luhan prophétisait que nous vivions tous dans un village planétaire.
Aujourd’hui, le tsunami est devenu le vecteur de cette mondialisation du malheur. Sa vague meurtrière a emporté d’une même lame enfants et adultes des pays riches et des pays pauvres.
C’est sans doute la raison pour laquelle cette catastrophe a été l’objet d’un élan sans précédent de générosité.
Générosité sincère de beaucoup d’occidentaux face à ce tsunami qui s’est déroulé au lendemain de Noël provoquant une compassion planétaire face à ce drame.
Les images et les récits des Occidentaux ont beaucoup contribué à cet Everest émotionnel.
Pourtant en 2003, un 26 décembre également un tremblement de terre s’était produit à Bam en Iran sans que le monde entier ne manifeste cet élan compassionnel.

Si on a vu des images au lendemain de la catastrophe de Bam les jours, les semaines suivantes, ce drame occupa de moins en moins l’actualité.
L’Iran est aussi un pays fermé et on n’y circule pas non plus aisément que dans ces pays touchés par le tsunami.
Preuve même de la difficulté pour les journalistes de travailler est le cas de la Birmanie.
Le Myanmar vit sous une loi d’airain gouverné par une dictature militaire et dont aucune image des désastres occasionnées par le tsunami n’a filtré.
Beaucoup de personnes ont dû malheureusement périr dans des cités lacustres qui bordent les rivages birmans, mais pas d’image, pas de compassion, et pas d’aide ou peu d’aide des ONG.
C’est pour cela qu’il faut toujours se méfier de ces justiciers ou donneurs de leçons qui regrettent que l’on n'ait pas fait autant pour le Darfour ou pour le Rwanda.
C’est certes déplorable, mais eux n’avaient pas fait plus en leur temps pour le Rwanda ou le Darfour.
On n’oppose pas un malheur à un autre malheur et il est certain que cette générosité jamais vue sert pour beaucoup à se dédouaner de ce qu’ils n’avaient pas fait auparavant.
C’est ainsi que des entreprises ou des stars communiquent sur ce drame en faisant bien savoir le montant de leur chèque en dollars !
Entre les guerres et les catastrophes naturelles, les situations sont différentes.
Ici, il s’agit de la plus grande catastrophe naturelle qui ait atteint de nombreux pays dans une aussi grande proportion.
L’événement a été médiatisé à la hauteur de la catastrophe.
Quand au Darfour ou au Rwanda, il s’agit de guerres et pour filmer ou photographier une guerre les journalistes ne disposent pas de la même liberté de mouvement et donc d’images à montrer.
Nous en voulons pour preuve l’Irak où l’année dernière, dix neuf journalistes ont péri.
Prises en otages de Chesnot et Malbrunot et aujourd’hui de Florence Aubenas de Libération sans oublier le caméraman Frédéric Nérac, disparu depuis le 22 mars 2003 au second jour de la guerre quand ce n’est pas une exécution pure et simple comme ce fut le cas du journaliste italien Enzo.Baldoni par les barbares d’Al Qaida !

Au Soudan, le pouvoir de Kharthoum ne verrait pas d’un bon œil, les journalistes venir fouiner au Darfour. Leurs images pourtant inciteraient à la compassion et donc à la générosité publique.

Depuis la guerre du Vietnam et l’effet dévasteur des images de mort qui pénétraient chaque soir dans les foyers, les militaires se méfient comme de la peste des journalistes et des photographes.
Lors de cette guerre d’Irak, les journalistes ne sont- ils pas «embedded », c’est à dire incorporés aux forces de la coalition ?
La liberté de la presse, c’est à dire la liberté d’écrire ou de photographier librement est singulièrement réduite.
Dans la situation irakienne, nous savons trop combien témoigner revient presque à se suicider et pourtant des journalistes indépendants essaient de continuer à faire leur travail.

Pour revenir sur cette couverture du tsunami par la presse, le traitement des images a été sans précédent dans les magazines et journaux.
Si Time, Courrier International ont été sobres dans leurs récits du tsunami en mettant en couverture cette pauvre femme indienne qui pleure l’un des siens, d’autres comme Paris Match ont été à la hauteur de leur réputation.
Magazine du poids des mots et du choc des photos, il n’a pas hésité à montrer ces cadavres gisant sur ces plages qui furent paradisiaques.
Pour ce 11 septembre écologique, pas de retenue dans le traitement de l’information contrairement à l’attaque des Twins Towers de New York où la presse dans un consensus inhabituel ne montra aucune image de cadavres.
Aux Etats Unis, il s’agissait de morts occidentaux et ici dans le cas de ce tsunami, si beaucoup d’Occidentaux ont aussi péri, les morts sont surtout asiatiques.
Travers de la loi Guigou que nous connaissons trop bien en France qui a interdit de publier le cadavre du préfet Erignac, mais qui ne trouve rien à redire lorsqu’il s’agit de morts du Tiers Monde !
Au cours de son second numéro consacré à cette catastrophe, Paris Match s’était paré d’une couverture en noir et blanc avec comme titre «  la Terre en deuil « . Et la photographie d’un Thailandais qui tient dans ses mains le portrait de sa fille probablement décédée ou disparue.

« Le Monde 2 »  si lui n’a pas cette politique sensasionnaliste a aussi également mis en couverture une image noir et blanc pour mieux accentuer la tristesse et la compassion qui sied face à cette catastrophe.
Dans sa livraison du 15 janvier, ce magazine présente un portfolio de Philip Blenkinsop de l’agence VU sur les ruines d’Atjeh en Indonésie où près de 100 000 personnes ont péri.
C’est là que le séisme a été le plus meurtrier puisqu’il se trouvait sur l’épicentre du tremblement de terre avec une magnitude de plus de 9 sur l’échelle ouverte de Richter.
Ce photographe assure qu’il y a rencontré chaos et dévastation et n’a jamais rien vu de tel, dit- il depuis Hiroshima.
Six pages en noir et blanc dénuées de tout sensationnalisme, mais où l’on perçoit tout le drame et la détresse de cette catastrophe avec en première page, cette femme qui pleure sur les ruines de sa maison engloutie par les vagues et dont il ne lui reste plus qu’une bicyclette.

Time a publié quatre images seulement, mais quatre images sur double page accompagnées du titre « Sea of sorrows » . Un océan de chagrin.
La première en Thailande est une image de Joanne Davis qui montre la vague tueuse dévaster un complexe hôtelier de Phuket.
La seconde image, poignante a été prise par Gurinder Osan de l’AP de villageois indiens pleurant leurs morts dans une fosse commune.
La troisième image de John Stanmeyer de l’agence Seven pour Time du désastre qu’a subi le Sri Lanka.
Et la dernière est celle d’Andrew Wong de l’agence Getty, étonamment belle, étonamment surréaliste s’il ne s’agissait de cadavres dans un temple bouddhiste à Takuapa que l’on préserve dans la glace pour ralentir leur décomposition.
Images de malheur et de tristesse qui explique cette compassion planétaire.

Et pourtant l’ignoble et le cynisme de certains occidentaux sont sans limite.
Preuve même cette photo publiée dans le magazine Maximal plus habitué à étaler dans ses pages d’accortes demoiselles peu vêtues.
Là, il s’agit de deux occidentaux peu vêtus et bedonnants sirotant leurs bières sur une plage de Thailande avec en arrière plan, les débris de la catastrophe !

Nous efforcerons de retenir plutôt les images de cette communauté tamoule de Sarcelles qui lors d’une des nombreuses cérémonies en mémoire aux leurs, morts au Sri Lanka ont su rester dignes dans le malheur qui a frappé l’Asie du Sud.

Martial BEAUVILLE.

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