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En ce moment et jusqu’au 6 février 2011, se tient, au Jeu de Paume, l’exposition photographique du célèbre André Kertesz. J’ai eu l’honneur de m’y rendre, lors de l’inauguration, en tant que jeune et nouvelle rédactrice de Belles images. Tout au long de la visite, nous avons le plaisir de découvrir et contempler son parcours photographique ainsi que son histoire, sa vie.Les photographies sont principalement en noir et blanc : il s’agit des originaux que le photographe a légués à l’état français.es débuts : sa famille et la HongrieAndré Kertesz est né en 1894, en Hongrie. À ses débuts d’amateur, il aime photographier sa famille, ses amis, sa femme et surtout son frère qui a été l’un de ses modèles les plus présents, mais également lui-même à travers des autoportraits. André Kertesz veut, tout simplement, immortaliser les siens, les personnes qui lui sont chères. Ces photographies sont pour lui comme un « journal intime visuel ». C’est un moyen d’expression. Son inspiration est née essentiellement de ses émotions et de ses liens affectifs. Il photographie également son pays en représentant les conditions sociales et environnementales, tout comme les paysages et les paysans hongrois. En 1914, il part à la guerre, sans oublier d’emmener avec lui son appareil photo. C’est ainsi que l’on peut le voir sur cet autoportrait en tenue de soldat austro-hongrois. Avec son appareil, il peut ainsi montrer la vie quotidienne des soldats.
Cette première étape de sa vie, se résume à des photographies instinctives et pleines d’émotions qu’André Kertesz veut nous faire partager.Ses débuts à Paris en tant que professionnel André Kertesz arrive à Paris en 1925. Il est enregistré à la préfecture de police en tant que « photo-reporter » Il publie plusieurs livres et illustre des magazines. Cela va l’aider à évoluer en tant que photographe professionnel. Pendant cette période, il va faire des séries de photographies sur des danseuses et des nus féminins en déformant les corps à l’aide de miroirs déformants : un autre style, plus artistique et poétique que laisse apparaître Kertesz dans ses photos.Il va également photographier des scènes de vie dans le jardin du Luxembourg, ainsi qu’une série sur Paris la nuit, qui sera publiées dans Paris vu par André Kertesz en 1934.
Pour notre photographe, Paris est une source d’inspiration. Toujours à la recherche de ses émotions, il joue et construit ses images avec les éclairages, les ombres, les reflets, les courbes, les lignes, les objets qui pourrait déformer le réel… Tous ces éléments entrent en jeu dans la composition des images de Kertesz et peuvent ainsi tromper le regard du lecteur. Cependant une photo est interprétée avant tout par le lecteur lui-même, puis est complétée par l’implication du photographe.
Cette deuxième étape de la vie de Kertesz se résume par son statut en tant que photographe-reporter, illustrateur pour des magazines et des livres, tout en laissant apparaître une touche personnelle à travers ses images.
« À la conquête de l’Amérique… »
C’est en 1936, que Kertesz, accompagné de sa femme, déménage et part pour New York. Dès son arrivée, André Kertesz signe des contrats avec de grands magazines. Mais à cette période là, Kertesz ne se sent plus l’âme d’un grand photographe, d’un photographe amateur qui laisse dévoiler ses sentiments à travers ses images. En effet, il définit son travail comme celui d’un « esclave » : il photographie des choses dont il n’a aucun ressenti, seulement dans le but de pouvoir vivre.Le découragement pour ce travail se ressent également dans ses photos : on peut lire et traduire des moments de solitude comme dans la photo du nuage, seul dans le ciel à coté du grand building. Alors, il décide de rompre ses contrats et retourne à son passe temps favori, photographier des choses dont il a envie. C’est ainsi qu’il va prendre des photos dans la ville de New York, en ayant comme seul objectif de montrer un regard : le sien. C’est alors que l’on peut retrouver les mêmes compositions avec des jeux d’ombres et de lumières… Entre temps, il publie ses photos et expose.
Renaissance
André Kertesz achève sa carrière de photographe professionnel en 1961. Cette période est, pour lui, synonyme de « renouveau ». Il retrouve et récupère les caisses de négatifs et tirages photos qu’il avait confiés à une amie lors de son départ pour New York. Cela lui donne l’occasion de faire un « inventaire » de son parcours photographique et de poser un nouveau et différent regard sur ce dernier. C’est ainsi, qu’il effectue des recadrages et des agrandissements de ses images. Voici un exemple concret d’un recadrage, sur le visage de sa femme, qui était à la base un portrait de leur couple.
Le nouveau regard qu’apporte André Kertesz sur ses photographies, lui donne un côté « revalorisant et vivifiant ». Il expose alors ces nouveaux tirages à la biennale de Venise et à la BNF. En 1977, sa femme décède, peu avant l’ouverture de son exposition rétrospective organisée au centre Pompidou. Il crée alors à New York, the André et Elizabeth Foundation.
Un tout dernier travail sur les polaroids
Notre photographe s’intéresse à un tout nouveau procédé : le Polaroid avec lequel il va effectuer une série d’images d’objets en verre entrelacés qu’il publiera dans un recueil en hommage à sa femme. Des images toujours très graphiques et à la fois très poétiques, un reflet sur sa vie et sur ses émotions…
Ce travail fut le dernier. André Kertesz s’éteint en 1985 à New York, après avoir légué un an plus tôt ses négatifs et ses archives à la France.
Je vous invite donc à aller voir cette jolie exposition du photographe André Kertesz. Une visite pleine d’émotions et de passion que le photographe a réussi à me transmettre à travers ses photographies et qui, je l’espère, vous emportera aussi…
Adeline MARMONIER
Musée du Jeu de Paume,
1 place de la Concorde
75008 Paris
Mardi de 12h à 21h.
Du mercredi au vendredi de 12h à19h.
Samedi et Dimanche de 10h à 19h.
Fermeture le lundi
Tél. 01 47 03 12 50
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